« Avec GAIA, je veux rendre le monde un peu plus beau »
Il y a environ un an et demi, Marcel Franssen a fondé GAIA circulair, une entreprise qui se consacre au développement de systèmes et de concepts durables. Ainsi, GAIA fournit aux entreprises des boîtes destinées à être remplies de vêtements de travail et d’équipements de protection individuelle (EPI) usagés ou mis au rebut. Ces articles sont ensuite recyclés (dans la mesure du possible). L’un des objectifs de Marcel est de rendre les vêtements (de travail) et les EPI durables et circulaires. Bien que l’on dénombre beaucoup de bonnes initiatives à cet égard, nous sommes encore loin du but.
Last updated: 25/11/2021
Qu’entendez-vous par le slogan « découvrir, développer et opérationnaliser » ?
« Je veux dire par là que nous collectons tout et que nous allons rechercher des solutions dans les années à venir. C’est à Bruxelles qu’a été conçue une législation qui donne aux fabricants une plus grande responsabilité pour le cycle de vie complet d’un produit, avec une attention particulière pour la reprise, le recyclage et la transformation finale. Nous voulons donner du contenu à cette réglementation. Plusieurs fabricants y travaillent déjà. Nous aimerions nous joindre à eux pour étudier la meilleure façon de gérer la logistique de retour par exemple.
De plus, en collectant de nombreux produits différents, nous tentons de renforcer la sensibilisation dans les entreprises. Afin qu’elles commencent à concevoir et à fabriquer leurs produits de manière plus durable, mais aussi afin que les clients finaux soient mieux informés de l’impact de leurs choix sur notre environnement.
Toutefois, toutes les matières premières ne peuvent pas être transformées de manière durable actuellement. Lors de la réutilisation du coton, par exemple, il faut toujours ajouter de nouvelles fibres de coton pour pouvoir garantir la qualité originale. De même, la transformation d’un gilet multinormes à revêtement multicouches en un produit circulaire exige beaucoup de travail. Mais je suis fermement convaincu que « en collaborant les uns avec les autres » et en tirant des leçons de ce processus complexe, nous pourrons réellement progresser ! »
Qu’advient-il des produits retournés ?
« Les boîtes de ressources contiennent toutes sortes de choses. Nous commençons donc par effectuer un tri. Les casques sont expédiés dans un centre pour leur démantèlement, après quoi tous les matériaux plastiques sont transformés en nouveaux produits. Pour l’instant, les chaussures sont simplement collectées. Nous effectuons des tests approfondis sur la meilleure façon de démonter les chaussures. Nous recyclons les chaussures en collaboration avec CFA (Circular Footwear Alliance). Cela concerne des milliers de chaussures par an que nous voulons rendre circulaires dès le stade de la conception. L’ensemble du processus progresse étape par étape. Pour l’instant, nous nous concentrons principalement sur le traitement final (recyclage), mais nous espérons pouvoir bientôt fournir également les matières premières.
Nous vendons une partie des articles que nous avons collectés après avoir retiré tous les logos. La réutilisation ou la prolongation de la durée de vie des produits est en effet le meilleur moyen d’éviter que les matières premières ne finissent trop vite dans les décharges. Nous expédions les vêtements de travail et les articles de confection qui sont encore en bon état à différents clients dans le monde entier. En outre, nous collectons des rideaux et des peluches pour Ikea Belgique. Et pour l’UEFA, nous transformons les vieux maillots. Nous effectuons la transition vers une économie circulaire étape par étape ! »
Qu’entendez-vous par économie circulaire ?
« C’est une économie où aucune matière première n'est perdue et où aucun déchet n'est créé. Une économie dans laquelle les produits sont conçus de manière à ce que les matières premières ou les composants restent disponibles pour la phase d’utilisation suivante, sans effets néfastes sur les personnes et l’environnement. Une économie où la valeur et la qualité des matières premières sont préservées.
Il y a de plus en plus d’initiatives dans ce domaine, comme dans l’industrie automobile. D’importants volumes sont déjà destinés à ce secteur qui réutilisera bientôt plus de la moitié de tous les vêtements de travail usagés. La production des garnitures et des tapis de voiture est de plus en plus souvent circulaire. »
Quels sont les EPI que les entreprises peuvent proposer ?
« Pratiquement tous, mais de préférence pas les bouchons d’oreilles ni les gants. Nous ne pouvons rien obtenir de ces articles compte tenu du mélange de matériaux. Nous les collectons en guise de service fourni aux clients, mais nous les brûlons et produisons de l’énergie. Nous préférons également ne pas recevoir des vêtements chimiques jetables. »
Il existe plusieurs initiatives dans le domaine de la logistique inverse. Comment se déroule la collaboration ?
« Les différentes parties travaillent encore trop peu ensemble. Mais dans un avenir proche, il y aura une contribution à l’élimination des vêtements. Ce système est connu sous le nom de Responsabilité élargie des producteurs (REP). De nouveaux projets sont mis en œuvre dans le domaine du textile d’entreprise, tels que CIRCLETEX, pour cartographier ce processus et chercher des solutions pour la réparation, la réutilisation et le recyclage des textiles collectés. Les entreprises doivent donc coopérer entre elles dans le domaine de la logistique inverse, mais aussi avec les fabricants de textiles et d’EPI. Nous sommes à la veille d’un changement majeur sur ce marché.
La base de données circulaire CIRMAR, qu'est-ce que c'est ?
« Actuellement, nous tenons un registre des produits collectés auprès des clients dans notre base de données. Cela nous permet d’informer clairement les clients sur les articles et les quantités qu’ils nous ont remis et sur l’effet des produits collectés sur les émissions de CO2. Dans la phase suivante, les produits recevront un passeport avec une spécification de toutes les matières premières. Ces données sont enregistrées dans CIRMAR, une banque de données pour les matières premières. Cela fournit ensuite une multitude d’informations sur les matières premières qui sont disponibles en vue de leur réutilisation, avec maintien de leur valeur.
Comment GAIA calcule-t-elle les économies réalisées par une entreprise sur les émissions de CO2 ?
« Les produits qui reviennent et les matériaux dont ils sont faits sont associés à des modèles mathématiques. Nous calculons les économies d’émissions de CO2 en fonction des traitements appliqués à ces produits. Cela correspond à l’économie que vous faites en recyclant un produit par rapport à l’impact de la fabrication d’un produit neuf. Les résultats sont des résultats objectifs qui peuvent être mesurés par rapport aux objectifs des clients qui sont liés à leurs ODD (Objectifs de développement durable). »
GAIA a acheté des machines qui transforment les vêtements usagés en fil. Où en est-on à cet égard ?
« Ces machines ne sont pas encore utilisées dans un environnement de production, mais elles sont testées dans un environnement de laboratoire. Des discussions sont actuellement en cours avec des fournisseurs d’articles de confection, de vêtements de sport et de vêtements de travail pour investir davantage dans ce domaine. Ici aussi, notre credo est de rigueur : nous progressons étape par étape dans la transition vers une économie circulaire.
Vos clients sont-ils également convaincus de la pertinence d’une chaîne d’approvisionnement plus durable ?
« Oui, de plus en plus. Les entreprises sont elles-mêmes responsables du tri des déchets. Selon la loi sur la gestion de l’environnement, les entreprises qui produisent plus de 2 000 kg de déchets par an sont tenues d’éliminer ces déchets séparément. Cela s'applique aussi aux déchets textiles. Si les entreprises restent en dessous de ce seuil, c'est à la commune de décider si les déchets doivent être éliminés séparément ou non. L’élimination sélective des déchets coûte effectivement plus cher aux entreprises, mais c'est aussi la raison pour laquelle ces déchets sont vendus. Nous montrons que si vous convertissez les coûts du recyclage, cela ne représente que 1 % du prix neuf. Dans cette perspective, les personnes sont bel et bien intéressées. »
Quel rôle voyez-vous pour des distributeurs comme Vandeputte ?
« Les distributeurs jouent un rôle important. Je pense qu’une entreprise comme Vandeputte devrait aussi faciliter les choses. Si comme vous, vous avez une « idée verte », vous devez savoir dans quelle mesure les produits que vous vendez sont durables.
Quels ont été les principaux défis pour GAIA depuis sa fondation ?
« La mise en place de la logistique inverse et la captation des entreprises n’ont pas été difficiles. Le plus grand défi consiste à changer l’attitude à la fois des producteurs et des utilisateurs finaux. La pression doit augmenter pour que la logique circulaire puisse se mettre en œuvre, ce qui sera facilité par la réglementation européenne. Les connaissances sont là pour effectuer cette transition, mais il faut disposer de ressources suffisantes, telles que des subventions. »
Où voulez-vous être dans 5 ans ?
« J’espère que GAIA aura un rôle central en Europe occidentale. Que nous connaissions les flux de ce qui est acheté, vendu et recyclé. Que nous maîtrisions ces processus. Il doit y avoir un concept de durabilité indépendant en ce qui concerne l’approvisionnement, l’utilisation et la sécurité. À cet égard, j'aimerais avoir un rôle important dans la gestion et la coordination non seulement de la collecte, mais aussi du tri et de la production des nouvelles matières premières. »